["Sexe à peel" est un jeux de mots. L'original anglais sex-appeal signifie attraction sexuelle. L'anglais "peel" veut dire éplucher, dans ce contexte probablement (zone intime) dénudée ou rasée. (ecoglobe)]
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Sexe à peel [Éditorial, page 3]
AVANT, IL Y AVAIT LA HONTE. Du sujet en soi, mais aussi de cette zone intime qu'il était inconcevable ne serait-ce que d'évoquer. A quoi s'ajoutaient la culpabilité d'éprouver du plaisir et la peur de tomber enceinte. Avec l'arrivée de la contraception, et de la libération des mœurs, on aurait pu imaginer que les femmes allaient enfin pouvoir vivre pleinement leur sexualité. C'était sans compter la force de l'héritage judéo-chrétien. Surfant sur les bons vieux fantasmes machistes, les médias ont engendré une nouvelle approche, aussi tyrannique que l'abnégation de l'ère précédente: le sexe dit parfait. Au commencement, il y a eu des injonctions sur la pratique en soi, relayées par certaines femmes elles-mêmes, émerveillées par ce champ des possibles: "Jamais sans mon vibro", "dix fois par jour je monte aux rideaux", "plus on est de fous, plus on rit" ou "si t'es pas sortie avec une fille à 40 ans, t'as raté ta vie". Du coup, les autres femmes - et les hommes! - ont eu matière à s'interroger sur leur normalité sexuelle. Et puis, de poupée Barbie en héroïne porno, de scène ultrazoomée en tuto, le sexe féminin - l'organe cette fois - s'est à son tour vu imposer des codes.
Empruntés à l'univers de la beauté, ils répondent à des critères esthétiques similaires et sont eux aussi érigés en "must have": la jeunesse - via le look petite fille imberbe - l'hygiène - qui va jusqu'à l'utilisation de crème astringente dans le vagin (oui, ça décape!) - et le fameux idéal symétrique, la chirurgie des lèvres étant décidément un créneau inépuisable.
Mais alors, question: entre les femmes chez qui le mot "vagin" est exclu tant il est tabou et les adeptes du scrubbing, y aurait-il un fond de vérité à l'expression "sexe faible"? Si, à l'instar du tube digestif qui serait notre véritable cerveau, le sexe féminin est notre véritable moi, à peel ou appeal, il semble être grand temps de l'émanciper des néo-diktats.
HÉLÈNE BÉZIAT RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE
Assummons nos vagins!
UNE FEMME SUR DEUX SERAIT COMPLEXÉE PAR L'APPARENCE DE SA VULVE. ÉPILATION, OPÉRATION: TOUT EST BON POUR LA RELOOKER... LIBRE CHOIX OU SOUMISSION À DES INJONCTIONS NORMATIVES QUI SONT AUTANT D'APPEL À LA HONTE? TEXTE MURIEL RISSE [pages 16-19]
ALICE N'AVAIT PAS de complexe. Son sexe ne lui avait jamais paru hors norme, bizarre ni moche. Mais ça, c'était avant. "Un soir, je suis tombée sur un film X. Et j'ai réalisé que je n'étais pas tout à fait normale à cet endroit." Soudain obsédée par la taille de ses petites lèvres qui (comme chez huit femmes sur dix, mais le sait-on?) dépassent des grandes, elle subira une opération "pour me sentir mieux". C'est-à-dire? "Plus désirable, plus moi". Un cas rare? Pas tant que ça, à en croire un sondage international réalisé en 2014. Selon lequel, même si toutes ne franchissent pas le seuil du bloc opératoire, une femme sur deux serait complexée par l'apparence de sa vulve.... 
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